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Question écrite n° 4-3080

de Paul Wille (Open Vld) du 27 février 2009

au ministre de la Justice

Services de renseignements et parquets - Écoutes téléphoniques - Skype - Fréquence

service secret
ministère public
protection des communications
bande de fréquences
technologie de l'information
nouvelle technologie
cryptographie

Chronologie

27/2/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 2/4/2009)
24/7/2009Réponse

Question n° 4-3080 du 27 février 2009 : (Question posée en néerlandais)

L’écoute téléphonique est une méthode assez intrusive mais elle constitue, moyennant un usage proportionnel et équilibré, une mine d’informations pour les services de renseignement (bientôt) et le parquet. En outre, le parquet semble de plus en plus favorable à la mise en œuvre des écoutes téléphoniques vu son efficacité dans le recueil d'informations.

Il s’avère cependant que ce contrôle peut facilement être évité par le biais du programme vocal IP Skype. Une conversation par le biais de Skype est codée de manière tellement complexe qu’il est très difficile de l’écouter. En outre, il s’agit d’une application liée au réseau IP considérée d’un point de vue légal non pas comme une écoute classique mais comme un piratage. Les développeurs de Skype refusent de communiquer aux autorités les codes du système de cryptage.

La British Broadcasting Corporation (BBC) a annoncé que des criminels se recommandent mutuellement Skype, sachant que la police italienne notamment a entendu une personne soupçonnée de trafic de cocaïne conseiller le service vocal IP à un complice.

Dans ce contexte, je souhaite poser les questions suivantes au ministre :

1. À combien d’écoutes téléphoniques le parquet a-t-il procédé en 2008 ?

2. Combien y en a-t-il eu en 2007 ?

3. Combien y en a-t-il eu jusqu’à présent en 2009 ?

4. Observe-t-on une tendance du parquet à recourir davantage et de plus en plus rapidement à l’écoute téléphonique ? Dans l'affirmative, qu'en pense le ministre ?

5. Le ministre est-il informé du problème décrit dans ma question ? Dans l’affirmative, quelle politique y associe-t-il ?

6. Le parquet est-il légalement en mesure de mettre sur écoute les conversations qui ont lieu par le biais de Skype ?

7. Le parquet est-il techniquement en mesure de mettre sur écoute les conversations qui ont lieu par le biais de Skype ?

Réponse reçue le 24 juillet 2009 :

1. 4 881 mesures d’écoute ont été exécutées en 2008. Il y a lieu de signaler, en l'occurrence, que si une mesure d'écoute a été initiée sur la base d'un numéro IMEI d'un GSM, celle-ci sera facturée par les trois opérateurs, étant donné que la mesure en question doit être initiée auprès de chacun d'entre eux. L'on peut ainsi enregistrer toutes les conversations engagées avec un même appareil qui utilise différentes cartes SIM de divers opérateurs.

Pour davantage d'informations, il convient de se reporter aux rapports d'évaluation rédigés chaque année par le Service de la Politique criminelle, en exécution de l’article 90decies du Code d’instruction criminelle.

2. 3 603 mesures d’écoute ont été exécutées en 2007. Pour de plus amples renseignements à ce sujet, il peut être renvoyé au rapport 2008, rédigé en exécution de l’article 90decies du Code d’instruction criminelle, que le ministre a transmis au Parlement.

3. Aucune donnée n’est encore disponible à ce sujet. Elles seront publiées en temps utile avec le rapport 2009, en exécution de l’article 90decies du Code d’instruction criminelle. Ce rapport est attendu pour l’automne.

4 En effet, force est de constater que la tendance à recourir à l’écoute téléphonique se renforce. On ne peut le nier. Il convient néanmoins de replacer cet usage accru de la mesure d’écoute dans le contexte d'une utilisation croissante généralisée des télécommunications dans notre société. À l’heure actuelle, télécommunications et informatique règlent notre société. Aujourd’hui, tout un chacun peut acquérir et utiliser un GSM, un smartphone, etc. Les criminels également malheureusement. Le GSM et d’autres applications informatiques sont utilisés de manière intense afin d’échanger des informations, de préparer des infractions et d’en faciliter l’exécution. L’expérience ne cesse de montrer que l’analyse des communications téléphoniques, mais certainement l’écoute également, ont largement contribué à l’élucidation d’infractions (graves).

Il est bien entendu indiqué d’envisager méticuleusement le recours à de telles mesures, dès lors que l’écoute affecte des droits individuels importants et fondamentaux, tels que le droit au respect de la vie privée.

5. La problématique concernée ne nous est pas étrangère. Le ministre de la Justice est en effet tenu de faire rapport chaque année au Parlement de l’application des méthodes particulières de recherche ainsi que des mesures d’écoute notamment (en exécution de l’obligation visée à l’article 90decies du Code d’instruction criminelle). Elles sont largement abordées, ainsi que d’autres expériences, lors de l’examen et la validation de ces données au cours de la Plate-forme nationale de concertation Télécommunications (PNCT).

Il a également été mis en avant la nécessité de poursuivre l’analyse et d’adapter les possibilités techniques et légales d’interception des communications/données ainsi que le régime des contrats et les frais y afférents.

6. En principe, le parquet n’est pas autorisé à mettre sur écoute des communications. C’est principalement le juge d’instruction qui est autorisé à ordonner, dans des cas exceptionnels, une mesure d’écoute, conformément à l’article 90ter, § 1er, du Code d’instruction criminelle. Le paragraphe 5 du même article précise qu’en cas de flagrant délit, le procureur du Roi peut ordonner la mesure visée au § 1er. La mesure doit néanmoins être confirmée dans les 24 heures par le juge d'instruction.

Appliquée aux conversations engagées par le biais du système Skype, le juge d’instruction est bel et bien autorisé légalement à les intercepter.

7. Bien que la mise sur écoute de conversations se déroulant par le biais de Skype soit autorisée par la loi, elle bloque sur le plan technique. En effet, l’interception de conversations qui ont lieu par le biais de Skype consiste, techniquement, à intercepter les flux Internet, ce qui requiert une collaboration structurée des opérateurs. Une telle collaboration nécessite néanmoins un arrêté royal adapté.

À ce jour, l'arrêté royal du 9 janvier 2003 ne s'applique pas aux fournisseurs d'accès Internet. Afin de remédier à cette problématique, l’on est en train d’élaborer un nouvel arrêté royal obligeant les opérateurs Internet à fournir une assistance technique.